Ces deux figures représentent la divinité Hevajra dans l’aspect kapaladhara, aux huit visages féroces, seize bras et quatre jambes enlacés à sa parèdre Nairâtmya. De ses pieds antérieurs, le dieu écrase deux Mâra, un démon hindou, alors que les postérieures exécutent un pas de danse devant deux autres Mâra, assis en adoration. Nairâtmya brandit une coupe crânienne et un couperet. Hevajra tient, dans chacun de ses multiples membres, un récipient semblable contenant soit un animal, soit une déité hindoue assise en orant. Les proportions allongées des figures, le contour souple, les nombreuses incrustations et les joyaux, sont révélateurs d’une influence népalaise, plus précisément, de celle des Newars de la vallée de Katmandou. Celle-ci est également visible dans le sens du mouvement, des proportions élancées, la souplesse du modelé, les nombreuses incrustations et les bijoux. D’autres détails, tels que les fleurons qui apparaissent en partie supérieure des brassards, et les guirlandes de têtes humaines, sont eux typiquement tibétains. De même, dans ce pays ces configurations ésotériques sont souvent réalisées avec des membres et des visages multiples assez féroces.
Réalisée par la technique de la fonte à la cire perdue, cette oeuvre participe de la culture du bouddhisme Vajrayana pour la pratique duquel ce pays est demeuré célèbre. Parmi les éléments communs au Népal et au Tibet était l’évocation stylisée de l’union sexuelle de deux déités, la partie masculine en tant que sujet salvateur, et sa contrepartie féminine représentant la sagesse. Leur union symbolique apporte l’émancipation.
Cette pièce provient d’une période dominée par les préfets de Rin-sprungs (1435-1565), constructeurs d’ensembles monumentaux tels que le rGyal-rtse au Tibet méridional. Elle témoigne d’un art typiquement local naissant des influences conjuguées du Népal, de réminiscences de l’Inde pala (VIIIe-XIe siècle), mais aussi de la Chine.