[English below]

Cet officier de marine qui découvre le Cambodge à vingt-quatre ans n’aura de cesse, sa vie durant, d’étudier l’art khmer ancien et de le faire connaître à ses contemporains. Ses publications et la collection d’œuvres originales qu’il expose en France dès 1874 sont pour beaucoup dans l’intérêt porté à cette civilisation fascinante.

Né à Loches en 1842, officier de marine dès 1858, Louis Delaporte est choisi pour ses talents de dessinateur en 1866 par le capitaine Ernest Doudart de Lagrée qui met alors sur pied une expédition destinée à l’exploration du cours du Mékong. Chargé de croquer les paysages que les scientifiques parcourent, Delaporte tombe vite sous le charme du Cambodge, alors encore peu connu, et de ses monuments qu’il découvre notamment à Angkor. Cela marquera son destin. À la faveur de deux missions officielles d’étude qu’il organise en 1873-1874 et 1880-1881, le lieutenant de vaisseau réunit en effet une documentation importante (plans, dessins, photographies, moulages) et une sélection d’œuvres originales que le roi du Cambodge accepte d’envoyer en France, en témoignage de la grandeur et de l’ancienneté de la civilisation khmère.

Phimanacas. palais des rois khmers, Louis Marie Joseph Delaporte (1842-1925) (attribué). Paris, mus »e national des arts asiatiques – Guimet. MG26650.

Présenté quelques années dans le hall d’entrée du château de Compiègne (1874-1878), son « musée khmer » connaît un succès populaire lors de la présentation des pièces majeures au Palais du Trocadéro, à l’Exposition universelle de Paris de 1878. Louis Delaporte parviendra à transformer cette exposition temporaire en un musée permanent. Ce sera le « musée indochinois du Trocadéro » qui, de biens des futurs chercheurs de l’Ecole française d’Extrême-Orient à Amedeo Modigliani ou Le Corbusier, a fasciné nombre de visiteurs parisiens jusqu’à sa fermeture en 1927.

´Vue générale des façades orientales de Baion prise de l’entrée des terrasses (détail), Louis Marie Joseph Delaporte (1842-1925), Joseph-Henri Deverin (1846-1921). Paris, musée national des Arts asiatiques – Guimet. MG26651.

« Amateur d’art », tel qu’il se définissait lui-même, Delaporte n’était ni sanskritiste, ni philologue, ce qui lui valut le mépris de bien des chercheurs contemporains et ultérieurs. Pour autant, son regard d’esthète, ses talents descriptifs rares ont fait de lui le témoin brillant d’un Cambodge qui n’avait pas encore été bouleversé par les grands travaux de restauration ou le pillage. Ses dessins et ses publications très illustrées restent, avec le patrimoine khmer qu’il a exposé et étudié en France, un apport majeur à notre connaissance actuelle du Cambodge ancien.


Louis Delaporte (1842-1925)

This naval officer, who discovered Cambodia at the age of 24, never stopped studying ancient Khmer art and introducing it to his contemporaries throughout his life. His publications and the collection of original works that he exhibited in France from 1874 onwards are largely responsible for the interest in this fascinating civilization.

Born in Loches in 1842 and a naval officer since 1858, Louis Delaporte was chosen for his talents as a draftsman in 1866 by Captain Ernest Doudart de Lagrée, who set up an expedition to explore the course of the Mekong River. Charged with sketching the landscapes that scientists travelled through, Delaporte quickly fell under the spell of Cambodia, then still little known, and its monuments, which he discovered in particular in Angkor. This marked his destiny. During two official study missions that he organized in 1873/1874 and 1880/1881 as ‘lieutenant de vaisseau’ he gathered important documentation (plans, drawings, photographs, casts) and a selection of original works that the King of Cambodia agreed to send to France, as a testimony to the greatness and antiquity of the Khmer civilization.

Presented for a few years in the entrance hall of the Château de Compiègne (1874-1878), his « Khmer museum » became a popular success only when the major pieces were presented at the Palais du Trocadéro at the 1878 Paris Universal Exhibition. Louis Delaporte succeeded in transforming this temporary exhibition into a permanent museum : the « Indochinese Museum of the Trocadero » which, from the property of future researchers from the Ecole française d’Extrême-Orient to Amedeo Modigliani or Le Corbusier, fascinated many Parisian visitors until its closure in 1927.

An « art lover », as he defined himself, Delaporte was neither a Sanskritist nor a philologist, which earned him the contempt of many contemporary and later researchers. However, his aesthetic eye and rare descriptive talents made him a brilliant witness to a Cambodia that had not yet been overwhelmed by major restoration work or looting. His drawings and his highly illustrated publications remain, along with the Khmer heritage that he exhibited and studied in France, a major contribution to our current knowledge of ancient Cambodia.