Cette image cultuelle représente le Grand Être de compassion, le bodhisattva Kannon. Debout sur un socle représentant une fleur de lotus et montrant de sa main gauche une tige de cette même fleur symbolique de la pureté bouddhique, l’effigie répond à l’iconographie première du grand bodhisattva, particulièrement vénéré au Japon dans la seconde partie de l’époque Fujiwara. Cette iconographie précise de Kannon permet de penser que la présente sculpture fut conçue comme l’un des éléments d’une triade centrée autour du Buddha transcendant de l’Ouest, Amida, et faisant pendant à une représentation d’un autre grand bodhisattva, Seishi, incarnant alors la sapience. D’un point de vue stylistique, cette oeuvre est comparable aux meilleures réalisations commanditées alors par les régents Fujiwara. Dans la mouvance de l’école de Jôchô, elle résume l’équilibre presque classique émanant des créations de ce temps, par une présence corporelle indéniable et par son modelé sensuel. Particulièrement proches des sculptures disposées sur l’autel du Konjikidô, au Chûson-ji, datées de 1124, notamment dans le hanchement léger et l’expression adoucie des traits du visage, il semble qu’elle puisse être datée du début du XIIe siècle.
Cette période voit l’évolution de la sculpture du bois par l’abandon de la sculpture monoxyle pour des créations résultant de l’assemblage de pièces de bois multiples, que recouvrent des pigments colorés ou des feuilles d’or appliqués sur la surface.
Cette pièce illustre le développement du bouddhisme japonais et tout particulièrement du bouddhisme de la Terre Pure (Jôdo-shu). Figurant la « Descente d’Amida » (raigô), de telles triades, apparues en peintures comme en sculpture au cours du Xe siècle, sont en effet caractéristiques de la faveur que connut, à la cour de Heian-Kyô, ces domaine de la dévotion bouddhique aux XIe-XIIe siècles.
D’après H. Bayou.