Dans les jardins de Chine et du Japon

On aime et on s’émerveille dans les jardins d’Asie, on y joue de la musique ou on y compose des poèmes, on s’y laisse surprendre ou perdre, on s’y enivre parfois pour quitter un temps les perceptions ordinaires et les jeux du pouvoir, pour enfin trouver une inspiration nouvelle.

Après la fondation de l’empire chinois au 3e siècle avant notre ère, les palais, les temples et les grandes demeures des nobles ou des riches propriétaires terriens incluaient des jardins, qui en ornaient les cours ou leur servaient d’écrin.

© MNAAG, Paris, Dist. RMN-Grand Palais / Ghislain Vanneste

Matin de printemps au palais des Han (détail)

Jardins de lettrés

Ce sont surtout les lettrés qui ont joué un rôle essentiel dans le développement et la codification d’un art des jardins spécifique, diffusé dans tout l’Extrême-Orient. Ils en ont fait leur cadre de vie idéal : dans ces lieux, il leur était possible de trouver refuge, d’échapper aux tracas de la vie officielle ou publique et d’occuper leurs loisirs en s’y adonnant à leurs activités favorites.

En Extrême-Orient, on ne plante pas un jardin, on le construit. Il constitue un monde clos, microcosme protégé et isolé, où se concentrent les énergies positives de l’univers, bénéfiques pour les usagers. Ces lieux de vie offrent en même temps un spectacle particulier à contempler et parcourir. Associant étroitement le bâti à l’eau, aux rochers, aux végétaux et même aux animaux, le jardin s’adresse à tous les sens.

Iris et rocher

© RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Richard Lambert

Iris et rocher

Les fleurs

Les fleurs et plantes cultivées jouent un rôle important dans l’aménagement des jardins. Combinées avec les pièces d’eau, les rocailles et les grottes qui y sont pratiquées, elles maintiennent une fraîcheur et une humidité constantes, l’imbrication du couvert et du plein air garantissant une régulation naturelle.

Les massifs d’arbustes ou les bosquets de bambous, les frondaisons des grands arbres, les plantes grimpantes accrochées à des treillages ou des pergolas, ménagent des zones d’ombre et filtrent la lumière. La flore naturelle, exceptionnellement riche et variée en Asie orientale, est pourtant loin de se retrouver telle quelle dans les jardins. Les jardiniers ont effectué des sélections parmi les plantes disponibles et obtenu, par l’art de la greffe notamment, d’innombrables variétés horticoles ou cultivars, destinées à produire fruits ou fleurs appréciés pour leurs formes, couleurs, goûts et parfums tels les pêches, kakis, citrus, azalées, hibiscus ou camélias. D’autres encore, telles le jasmin ou le bananier, ont été introduites et acclimatées.

Admiration des pivoines en fleur

 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Harry Bréjat

Admiration des pivoines en fleur

Essences de Chine

Du fait de leur récurrence, certaines plantes peuvent être considérées comme des éléments classiques du jardin. Leur présence y est en quelque sorte attendue : c’est le cas du pin, du bambou, du lotus ou encore de la pivoine, « reine des fleurs » à la cour des Tang (618-907).

S’est ainsi établi, peu à peu, un répertoire botanique propre au jardin, riche en associations, ou en allusions de toutes sortes, liées à la culture lettrée. Ainsi la fleur de l’abricotier de Chine, l’orchidée, le lotus et le chrysanthème, symboles des quatre saisons, sont familiers à l’usager du jardin, qui prend plaisir à les y retrouver. La floraison précoce des divers prunus (mais aussi d’autres arbres fruitiers de la famille des rosacées), annonçant le printemps, est particulièrement célébrée et l’occasion de visites et réunions. Les branches fleuries de l’abricotier de Chine sont cueillies et disposées à l’intérieur des pièces dans des vases meiping.

© RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

Recueil de dix belles fleurs amies (détail)

Essences du Japon

Au Japon, ce sont surtout les fleurs de cerisiers (hanami), aux variétés innombrables, qui sont admirées pour leur beauté exquise mais fragile et d’autant plus précieuse qu’elle est éphémère ; à l’automne leur répondent les feuilles rougies momiji des érables. Ces plantes choisies et aimées constituent non seulement les références favorites du jardinier, mais aussi celles du peintre et du poète : sans cesse évoquées dans la littérature, elles sont régulièrement figurées dans la peinture et, sous l’influence de celle-ci, dans l’ensemble des arts décoratifs.
 

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