Ce masque fut légué au musée Guimet par Alexandra David-Neel (1868-1969) ; elle en avait, semble-t-il, fait l’acquisition au Ladakh lors de ses aventureuses pérégrinations dans le monde himalayen, qui devaient notamment la mener jusqu’à Lhassa, en 1924.
Les danses bouddhiques masquées, ou cham, au caractère éminemment sacré, constituent un aspect important des rituels du bouddhisme tantrique. D’origine très ancienne, elles sont exécutées par des religieux spécialement formés, lors de fêtes importantes réunissant dans la cour des monastères moines et fidèles qui se pressent toujours très nombreux à ces cérémonies aussi belles et colorées que spectaculaires. Ces danses codifiées, exigeant des pratiquants une concentration parfaite, mettent en scène de multiples personnages du panthéon bouddhique ou du folklore, parmi lesquels diverses déités à l’aspect paisible ou farouche. Pour les moines-danseurs, le cham constitue une forme de méditation dynamique, intense et dramatique, le plus souvent en lien avec la soumission des forces démoniaques entravant la voie menant à l’Éveil spirituel.
Les masques sont portés haut sur la tête et maintenus au moyen de cordelettes entourées de bandelettes de tissu afin d’éviter que les exécutants ne se blessent lorsqu’ils sont en mouvement. C’est par la bouche entrouverte de ces masques, et non par les yeux, que les danseurs regardent.
L’aspect général du visage aux traits courroucés, sa couleur bleue, ainsi que les têtes de mort qui ornent le diadème, semble correspondre ici à Mahakala, l’un des plus grands dieux protecteurs des enseignements (dharmapala) au sein du bouddhisme ésotérique.