Bouddha protégé par le naga

Asie du Sud-Est
Fin du 12ème siècle – début 13ème siècle, époque angkorienne
111 x 66 x 39 cm
Grès
Légende

Bouddha protégé par le naga

Titre de l'alerte Œuvre exposée actuellement au Musée Guimet - Place d'Iéna

Les sculpteurs khmers ont su représenter le samadhi – cet état physique et psychique propre à la méditation – avec une maîtrise expressive des plus convaincantes.

Le Bouddha est ici représenté buste droit, bras détendus et mains posées l'une sur l'autre dans le giron, comme abandonnées. Cette œuvre restitue parfaitement l'état de relâchement du corps en tension propre aux exercices de méditation et de retour en soi prôné par Shakyamuni (le Sage du clan des Shakya), ainsi qu’il est parfois d’usage de désigner le Bouddha, en référence à la famille princière dans laquelle il naquit au tournant des 6ème et 5ème siècles avant notre ère. Une telle iconographie fait aussi référence à un épisode connu de la vie du Bienheureux, épisode au cours duquel un cobra polycéphale nommé Muchilinda le sauva de la noyade alors qu’il méditait près d’un lac dont les eaux en crue menaçaient de l’emporter.

Sous le règne de Jayavarman VII (r. 1182 / 83 – vers 1220), selon une esthétique pétrie d’humanisme, le Bouddha est presque toujours représenté assis en méditation sur le corps enroulé de Muchilinda dont les sept têtes lui font une sorte de capuche. Son visage souriant est éclairé d’une expression apaisée et sereine, en une remarquable illustration du sentiment de détachement absolu, d'introspection totale et de parfaite quiétude propre à la signification symbolique de ce type d’iconographie.

Découverte par Louis Delaporte en 1873 dans les ruines du grand temple de Bakan (jadis connu sous le nom de Preah Khan de Kompong Svay), cette œuvre au modelé sensible et presque réaliste est caractéristique du style du Bayon ; elle en présente la chevelure aux larges boucles simplement incisées, la coiffe à décor de pétales de lotus masquant la protubérance crânienne, mais aussi la ceinture orfévrée ciselée de fleurs épanouies et munie de pendeloques foliformes, détail qui ne se révèle pour cette œuvre que lorsqu’on l’observe de dos. De manière originale, le Bouddha n’est pas figuré ici avec les yeux clos comme il serait normal dans le style du Bayon. Sans pouvoir en préciser la raison, il semble que les incisions mal assurées qui dessinent les yeux en amande et l’iris ont été réalisées après coup. Il s’agit là d’un exemple des modifications dont les œuvres khmères ont parfois été l’objet, après leur période de création. Quoi qu’il en soit, la sobriété et l’élégance de cette sculpture s’accordent idéalement à l’éthique religieuse de l’époque de Jayavarman VII, toute de spiritualité et de rayonnante sérénité intérieure.

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