L’une des illustrations les plus séduisantes de l’art népalais évoque, au moyen d’une iconographie destinée à frapper les esprits, la venue au monde d’un être d’exception – le Bouddha – qui marquera à jamais l’histoire spirituelle de l’Humanité.

La reine Maya donnant naissance au futur Bouddha, Népal, début du 19e siècle, alliage de cuivre doré, en partie doré et incrusté, avec reste de polychromie, achat, 1955, MA 1779

La légende rapporte que la reine, en route vers la demeure de ses parents, dut s’arrêter dans le jardin de Lumbini aujourd’hui dans le Teraï népalais, au sud du pays pour donner le jour à son enfant. Afin d’exprimer la nature extraordinaire de l’être à venir, les circonstances de son entrée dans le monde le sont, elles aussi : il naît, en effet, au terme de dix mois de gestation, et sort du flanc droit de sa mère, afin de ne pas être souillé, mais aussi de ne pas la blesser, nous disent les textes. Le futur Bouddha apparaît à son flanc, les cheveux déjà relevés en un haut chignon, avec les mains jointes, comme déjà conscient de la mission qui sera la sienne sur Terre. Maya elle-même, demeure debout en cette circonstance, le visage serein, effectuant de la main gauche le geste de l’enseignement.

L’iconographie représente Maya à la manière des représentations de déesses à l’arbre de l’Inde ancienne, c’est-à-dire debout, gracieusement déhanchée sous un arbre, symbole de fertilité et d’abondance, dont elle tient l’une des branches fleuries ; l’enfant est ainsi d’autant plus visible. L’abondance est ici parfaitement illustrée par la somptuosité du décor de pierres semi-précieuses ornant les branches. Des pétales de lotus stylisés, symboles de pureté, décorent la base.

La statuette, en bronze doré, comporte trois parties coulées séparément, puis emboîtées les unes dans les autres, tandis que le tronc est formé d’une feuille de métal martelée ; les tiges de feuilles sont en métal plein et les parures de la reine sont rapportées, de même que les pans virevoltants de son écharpe. L’œuvre est tout à fait représentative de la virtuosité technique des artistes népalais, du sens du mouvement dont ils animent les œuvres et qui perdure à travers toute l’histoire artistique de la vallée de Katmandou, ainsi que du goût pour l’aspect décoratif des images. Celui-ci s’allie, sur cet exemple, de manière particulièrement harmonieuse avec la beauté de l’événement dépeint, et la pièce du musée Guimet constitue l’une des plus belles du genre, au sein de la production métallique du Népal.