Ce manteau spectaculaire adopte la coupe des vêtements d’Asie centrale, fermé sur le côté, avec un petit col montant et de longues manches ajustées. L’iconographie, le style et la technique des tissus qui le composent permettent de le rattacher à un groupe de soieries traditionnellement attribué à la Sogdiane des 7e-8e siècles. 

Il est composé de deux tissus à fond rouge aux motifs différents, tous deux réalisés selon la technique du samit. Le tissu principal, employé pour le devant et le dos du vêtement, ainsi que pour les manches présente un motif animalier en registres alternés : une ligne de cerfs affrontés deux à deux en alternance avec une ligne de béliers adoptant la même disposition. Chaque animal est inscrit dans un cartouche rectangulaire, délimité par des frises perlées.

Le tissu utilisé pour les inserts de chaque côté du corps, ainsi que pour le col et les extrémités de manches (dont une seule est conservée) est différent. Il présente au centre d’un médaillon perlé, un décor d’oiseaux affrontés perchés deux à deux sur une palmette fendue. On observe, comme pour le tissu principal, l’alternance de deux motifs d’une ligne à l’autre. Les intervalles entre les médaillons sont agrémentés de rosettes.

L’attribution sogdienne de ces tissus, qui repose sur l’interprétation d’une inscription présente sur une soierie du trésor de la cathédrale de Huy (Belgique), est aujourd’hui largement remise en cause.  L’emploi de ces soieries dans la Sogdiane des 7e et 8e est par contre clairement attesté siècle par de nombreuses peintures sur les murs des maisons de Pendjikent et Samarkande. Celles-ci représentent souvent de riches dignitaires vêtus de manteaux qui font usage de ces tissus, en particulier pour les bordures. Des soieries du même groupe ont été découvertes dans des tombes du Caucase du Nord et de l’ouest de la Chine, dans l’actuelle province du Xinjiang (Astana, Dulan). La circulation de ces tissus est enfin attestée par leur présence dans le trésor d’églises européennes. L’absence de provenance connue pour la grande majorité de ces textiles ne permet pas d’éclairer la délicate question de leur attribution.

Si le contexte de fabrication de ces tissus demeure aujourd’hui largement incertain, ils témoignent des échanges artistiques et technologiques qui avaient cours le long des routes de la Soie qui reliaient l’empire Byzantin, l’empire Perse des Sassanides, plus tard le monde islamique, avec la Chine. Leurs caractéristiques techniques, iconographiques et stylistiques témoignent à de nombreux égards de l’influence Sassanide.

D’un point de vue technique, il s’agit de samit, c’est-à-dire de tissus façonnés présentant un décor à effet de trame lié en sergé qui – contrairement au lampas – ne dispose pas de trame de fond (les chaînes-pièce présentes à l’intérieur du tissu ne sont pas liées et servent uniquement à la séparation des trames de décor (ici : rouges, jaunes, vertes et bleues), selon qu’elles apparaissent sur la face ou l’envers du tissu). Les origines de cette technique sont traditionnellement attribuées à la Perse vers le début du 1er millénaire de notre ère. Sur le plan iconographique, la disposition du motif en médaillons perlés, ainsi que le répertoire animalier, de même que certains détails à l’instar du ruban noué à l’encolure des animaux représentés, sont autant de témoignages de cette influence. Les éléments schématiques ornant le pelage des animaux sont caractéristiques de cette famille des tissus dits « sogdiens ».