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En 2017, l’inauguration de la nouvelle galerie du mobilier chinois au premier étage de l’hôtel d’Heidelbach a permis de présenter à nouveau au public deux somptueux paravents de laque qui étaient alors conservés en réserve faute d’espace approprié pour leur exposition.
Ces deux joyaux de la collection du MNAAG sont dorénavant réunis dans la « salle aux paravents » ou « salle Langweil », du nom de la célèbre collectionneuse, généreuse donatrice à laquelle nous devons l’entrée dans les collections de l’un de ces chefs-d’œuvre : le paravent à décor de pins et de grues.
Les paravents jouaient un rôle essentiel dans l’aménagement des riches demeures chinoises dont l’architecture, qui repose sur des colonnes, est traditionnellement dépourvue de cloisons. Ces écrans souvent monumentaux étaient employés pour délimiter la sphère publique de la sphère privée et servaient à magnifier la place d’honneur.

À partir du 16e siècle, les grands paravents, composés de huit à seize feuilles – douze le plus souvent – et pouvant atteindre 3 mètres de haut, constituent un cadeau de prestige offert aux fonctionnaires de l’administration impériale à l’occasion d’une promotion, d’un départ en retraite, ou d’un anniversaire éminent (plus de 60 ans). Autant d’occasions commémorées par les inscriptions présentes au revers des panneaux. Celles-ci consignent les titres et mérites de la personne honorée, l’occasion pour laquelle le paravent a été commandité ainsi que le nom des donateurs. La face noble porte quant à elle un décor qui se déploie sur l’ensemble des panneaux, enserré par une bordure. Les thèmes iconographiques choisis, qu’il s’agisse de paysages peuplés ou non de figures, ou de fleurs et oiseaux, sont porteurs d’un message de bon augure. Le décor est exécuté selon une technique originale dans laquelle la surface de laque est profondément incisée et évidée par endroits, avant de recevoir des motifs polychromes modelés en creux et parfois rehaussés de dorures.
Dès le milieu du 17e siècle, ces extraordinaires objets sont exportés vers la côte orientale de l’Inde – à laquelle ils doivent leur appellation de « Coromandel » –, depuis laquelle ils sont ensuite embarqués sur les bateaux de la Compagnie des Indes et acheminés vers l’Europe. Ils y connaitront, durant plus d’un siècle, un succès spectaculaire. Souvent démembrés, leurs précieux panneaux de laque, furent incorporés dans le décor mural ou le mobilier des plus somptueuses demeures.
The folding screens gallery of the Hotel Heidelbach
In 2017, the opening of the new Chinese Furniture Gallery on the first floor of the Heidelbach Hotel made it possible to reintroduce to the public two sumptuous lacquer screens that were then kept in reserve due to lack of suitable space for their exhibition.
These two gems of the MNAAG collection are now housed in the « Folding screens gallery » or « Langweil Gallery », named after the famous collector and generous donor who brought one of these masterpieces into the collection: the screen with pine and crane decoration.
Screens played an essential role in the furnishing of rich Chinese homes whose architecture, based on columns, is traditionally devoid of partitions. These often monumental screens were used to delimit the public from the private sphere and served to magnify the place of honour.
From the 16th century onwards, large screens, consisting of eight to sixteen panels – usually twelve – and up to three metres high, were a prestigious gift to imperial civil servants on the occasion of a promotion, retirement, or an eminent birthday (over 60 years of age). These occasions are commemorated by the inscriptions on the reverse side of the panels. These record the titles and merits of the person being honoured, the occasion for which the screen was sponsored, and the names of the donors. The noble side of the panels is decorated with a decoration that extends across the entire panel, enclosed by a border. The iconographic themes chosen, whether landscapes with or without figures, or flowers and birds, carry a message of good omen. The decoration is executed using an original technique in which the surface of the lacquer is deeply incised and hollowed out in places, before receiving polychrome motifs modelled in hollows and sometimes enhanced with gilding.
From the middle of the 17th century, these extraordinary objects were exported to the east coast of India – to which they owe their name « Coromandel » – from where they were shipped on the ships of the East Indies Companies and transported to Europe. There they enjoyed spectacular success for more than a century. Often dismembered, their precious lacquer panels were incorporated into the wall decoration or furniture of the most sumptuous homes.