Dans le cadre d’un travail d’équipe, l’artiste plasticien Pascal Convert a photographié les traces laissées par les gestes provocateurs et iconoclastes des Talibans sur des peintures murales d’une des grottes du site archéologique de Bamiyan en Afghanistan.
Bamiyan est au centre de l’Afghanistan, à 200 kilomètres au nord-ouest de la capitale, Kaboul. Difficile d’accès, d’un climat rigoureux, et de ce fait à l’abri des invasions, la ville et sa région sont pourtant rattachées successivement à différents empires : achéménide, grec, kouchan, sassanide, kidarite, hephtalite ou encore turc. En 632, le moine chinois Xuanzang rapporte que Bamiyan est un centre bouddhique en plein épanouissement occupé par plus de mille moines. En 650, les Turcs font allégeance à Gaozong, l’empereur de Chine. La population se convertit progressivement à l’islam après la conquête de la région à la fin du 9e siècle. En 1221, la ville est détruite et enlevée par les Mongols de Gengis Khan. Bamiyan est comme coupée du monde jusqu’au 19e siècle quand le témoignage de voyageurs européens la sort de ce long sommeil.
La notoriété du lieu est attachée à son site archéologique, juste à côté de la ville. Celui-ci est riche de plusieurs centaines de grottes, dont certaines peintes, et de gigantesques figures de bouddhas sculptées dans la falaise de grès. Les détails de ces œuvres monumentales, à l’origine polychromes, sont modelés avec un mélange de stuc, de paille et de boue. Bamiyan gagne une sinistre célébrité lors de la destruction des deux bouddhas monumentaux de la falaise par les Talibans le 11 mars 2001. Les images montrant l’effondrement conjoint des deux bouddhas semblent l’épouvantable signe annonciateur de l’effondrement des tours du World Trade Center à New York. Cinq ans après les actes terroristes de 2001, Pascal Convert participe à la numérisation de la totalité des 1,5 kilomètres de la falaise. Le fichier obtenu, avec un drone habituellement, se compose de quatre mille photographies et permet la restitution en deux et trois dimensions du site à une échelle grandeur nature.

Parallèlement à ce projet, l’artiste travaille sur la peinture d’une des grottes de Bamiyan vandalisée par les Talibans en apposant l’empreinte de leurs semelles blanches de poussières à la surface de l’œuvre, voilée préalablement de noir de fumée. On a détruit des icônes mais aussi produit une nouvelle image. Si l’objectif des Talibans est de nous faire perdre la mémoire, il est assuré, par la présence de cette photographie, que ces fresques martyres y resteront à jamais.