Guidés par l’éclat de la pleine lune, leurs lampes électriques à la main, les photographes Caroline et Hugues Dubois nous immergent dans l’univers minéral de Borobudur à Java et nous font redécouvrir les bas-reliefs de ce temple bouddhique monumental.

Cette photographie, réalisée entre avril 2013 et novembre 2015, appartient à un travail beaucoup plus vaste consacré par Hugues et Caroline Dubois au plus grand monument bouddhique du monde, Borobudur, en Indonésie, au centre méridional de l’île de Java. Il fut édifié entre le 8e et le 9e siècle. Réalisées à la lumière de la lune, leurs photographies sont, dans leur première forme, à l’échelle réelle des bas-reliefs, c’est-à-dire monumentales. Un portfolio en a été tiré.

Borobudur under the full moon, Indonésie, avril 2013 – novembre 2015 (prise de vue), avril 2017 (épreuve), épreuve au platine sur papier, achat, 2017, AP21957 à AP21965

Abandonné semble-t-il vers l’an 1100, le monument, à la fonction discutée, a été redécouvert au début du 19e siècle par le Britannique Thomas Stamford Bingley Raffles, célèbre pour avoir fondé Singapour. Il envoya sur place un ingénieur néerlandais, H. C. Cornelius, afin de le dégager de la végétation sous laquelle il était enseveli. L’ensemble du monument comporte 2760 bas-reliefs sculptés, couvant 2500 mètres carrés, répartis entre la base et cinq plates-formes successives carrées. Ces reliefs sont narratifs sur les premiers niveaux, didactiques sur les niveaux supérieurs.

Ce bas-relief, qui fait partie de cette seconde catégorie, renvoie au quatrième précepte du bouddhisme :  Je m’abstiendrai de paroles mensongères. L’éthique bouddhique dénonce ainsi les comportements destructeurs : médire, jurer et parler inutilement ; précepte probablement le plus difficile à tenir…

Pour cette photographie, les auteurs ont opéré sous la clarté diffuse de la pleine Lune, l’obturateur de leur appareil ouvert, munis d’une source lumineuse qu’ils ont promené sur les bas-reliefs afin d’en révéler la texture et la couleur, tout en leur rendant une unité de ton que les lichens brouillent à la lumière du jour. Le résultat nous donne l’impression que les personnages se meuvent tout en conversant entre eux. Chaque scène est baignée d’une lumière qui lui est propre car c’est à la fois la forme et le volume des éléments sculptés qui dirigent le pinceau de lumière des photographes à la surface des choses. Le procédé souligne magistralement la délicatesse du modelé, la rondeur des physiques, la subtilité de la profondeur de champ de ce chef-d’œuvre de la sculpture en Asie.